Artificial Intelligence: Threat or Complement?
Discussion with Luc Ferry on AI, global tech investment, job impact, and Europe's role in AI advancement.
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Intelligence artificielle, école. linterview de Luc Ferry, ancien ministre en intégralité
Added on 01/27/2025
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Speaker 1: — Suite de BFM Story, nous allons parler notamment d'intelligence artificielle avec le philosophe Luc Ferry. Grand remplacement ou complémentarité. Bonsoir, Luc Ferry. — Bonsoir, les amis. — Et on va commenter aussi plus légèrement l'actualité aussi avec Nathalie Lalatrousse,

Speaker 2: la chef du service politique de BFM TV. — On n'a pas oublié que Luc Ferry a été ministre de l'Éducation. — Entre autres.

Speaker 1: — Mais restons sur l'intelligence artificielle avec ce nom qui va résonner et qu'il ne faut pas oublier qui s'appelle Stargate. Stargate, c'est ce projet qui est lancé par Donald Trump. Et les milliardaires de la tech aux États-Unis, il s'agit d'investir 500 milliards de dollars dans les infrastructures d'intelligence artificielle. Autant écouter l'intéressé lui-même.

Speaker 3: — Stargate. Écrivez ce nom sur vos cahiers, parce que vous allez en entendre parler dans l'avenir. Une nouvelle entreprise américaine va investir au moins 500 milliards de dollars dans les infrastructures d'intelligence artificielle, et ça très rapidement.

Speaker 2: Ça va créer quasiment 100 000 emplois américains. — Alors cette déclaration provoque la première friction entre Elon Musk et Donald Trump. Le patron de Tesla, qui est à fond sur l'intelligence artificielle, estime qu'il n'y a pas le début d'un dollar, que ces 500 milliards annoncés par Donald Trump, pour l'instant, ça n'existe pas. Qu'est-ce que vous en pensez ? Est-ce qu'il faut s'inquiéter ?

Speaker 4: — C'est-à-dire que ce sont en fait les entreprises privées qui vont mettre l'argent. Voilà. Les entreprises privées elles seules vont mettre les 200 milliards juste sur l'année 2025. Et les Chinois en font autant. Pendant que la France... Le rapport Draghi est très bien sur l'Europe, sur le fait qu'il faut investir. Mais on n'a pas l'argent. — Vous écrivez dans le livre « Les Européens n'ont pas compris que les pays

Speaker 2: qui maîtriseront l'IA, l'intelligence artificielle, maîtriseront le monde ». Or, dans les 15 leaders mondiaux de la tech, aucune entreprise européenne.

Speaker 4: — Exactement. Il n'y a pas une seule entreprise européenne. Et c'est dramatique, parce que c'est pas simplement une question d'argent et d'économie. C'est une question de civilisation, parce qu'encore une fois, on va devenir une colonie des États-Unis. Je suis intervenu beaucoup auprès des militaires français. Donc j'ai fait une conférence l'autre jour devant 700 militaires. Donc il y avait des amiraux, des généraux. Il y avait tout juste après le général Burckhardt, qui est le patron de la maison, si je puis dire. Et un des généraux me disait après la conférence qu'il faudrait investir 40 milliards de dollars pour retrouver la souveraineté militaire française, parce que tous nos systèmes de surveillance, même par exemple le système Scorpion qui coordonne les attaques de chars, les guidages de missiles, tout ça, c'est américanisé aujourd'hui. Donc on dépend des États-Unis. Et donc on a un vrai problème de souveraineté française et européenne par rapport à cette intelligence artificielle.

Speaker 2: — Et pourquoi c'est si important, l'intelligence artificielle ? On en reparle. Je pense que ça reste encore assez flou pour beaucoup de Français, moi le premier. Pourquoi c'est important ? Est-ce que c'est un vrai progrès ? Est-ce qu'il faut en avoir peur ? — Il y a deux choses. Dans le domaine de la médecine,

Speaker 4: ça va sauver des dizaines, voire des centaines de millions de vies dans les 2 ou 3 décennies qui viennent. Notamment, moi, j'ai enseigné la biologie, biologie-philosophie à Jussieu quand j'étais plus jeune, biologie du cancer. Il n'y a pas d'immunothérapie. Il n'y a pas de thérapie ciblée du cancer. Il n'y a pas de séquençage du génome d'une cellule cancéreuse sans IA. On a calculé qu'il faudrait 40 ans au cerveau humain pour séquencer le génome d'une cellule cancéreuse. Et il faut le faire pour faire des thérapies ciblées. Il faut quelques secondes ou quelques minutes à l'IA. — Donc ça va aider à nous soigner. — Bien sûr. Là, c'est formidable en positif. Maintenant, là où il y a un immense problème, et c'est le premier que j'analyse dans ce livre très en détail, Sam Altman a déclaré qu'on aurait dans la décennie qui vient des licornes, c'est-à-dire des entreprises valorisées

Speaker 5: à plus de 1 milliard de dollars. — C'est un patron d'équivalent à Elon Musk, Sam Altman, peut-être, pour les téléspectateurs.

Speaker 4: — Oui, Sam Altman, c'est l'inventeur de Chargipity, que tout le monde connaît maintenant. C'est le patron d'OpenEye. Et Chargipity, maintenant, presque tout le monde s'en sert, même s'il faut s'abonner pour avoir la vraie efficacité. Mais j'y reviens. Il dit qu'on aura des licornes, c'est-à-dire des entreprises valorisées à plus d'un milliard de dollars sans un seul salarié humain. Il y a une étude de Goldman Sachs disant qu'on aurait dans la décennie qui vient 300 millions d'emplois qui seront supprimés, remplacés par l'IA. Ma fille travaille dans une boîte du luxe à Genève. Il n'y a plus une seule secrétaire. Tout le courrier est fait par Chargipity.

Speaker 2: — Mais on va pas supprimer que les secrétaires. On va supprimer aussi peut-être des avocats, des acteurs. On parlait du doublage. — Des traducteurs. — Des traducteurs. En fait, c'est tous les métiers. Peut-être des philosophes. Non ? Ah, peut-être pas.

Speaker 4: — Non, mais si, si. Il peut passer la grecque de philo sans aucun problème. Mais on peut passer la grecque de philo sans être philosophe. Ça n'a rien à voir. Mais je vous explique pourquoi. — Mais qu'est-ce qui va rester à l'homme, alors ? — C'est le grand problème. En fait, à part les génies... — Oui. — Ce sera très difficile. À part les génies et la gentillesse. Pourquoi la gentillesse ? Parce que Chargipity... Je vous explique pourquoi c'est... Que ce soit d'ailleurs Chargipity ou Claude III ou Gemini, les 3 grands ou Groc, si vous voulez, les 4 grands de l'IA générative. Donc ces IA qui fabriquent des images, des textes, etc., à la demande et qui sont... On parle avec elles, là, en 3 secondes comme avec un humain. Là, j'ai demandé ce qu'avait fait par exemple Victor Hugo entre 1830, les journées de juillet et 1848. C'est génial, ce qu'il me met. C'est au niveau d'un très grand prof d'université, les réponses. C'est parfait. Et donc je vous explique pourquoi il restera la gentillesse et le génie. Pourquoi ? Parce que ces IA sont... C'est le terme technique. Alignées. Alignées sur des codes éthiques. Par exemple, les IA californiennes sont alignées sur des codes éthiques qui, en gros, sont démocrates californiens. Si vous demandez à Gemini la recette du foie gras, il vous dit non parce que c'est mauvais pour les animaux, c'est cruel. Et donc il vous renvoie à PETA, qui est l'écrivain de L214. Quand on avait demandé à Gemini de représenter les pères fondateurs des États-Unis, il y avait un Africain, un Chinois, un Lord Anglais et une femme parce qu'il est pour la diversité. Ça fait rigoler tout le monde. Ça a été corrigé. Mais ça veut dire que c'est... Mais vous pourriez fabriquer des IA, les aligner sur n'importe quel code éthique. Elles pourraient être staliniennes, nazies, platoniciennes, kansiennes, spinozies, ce que vous voulez. — Alors pourquoi la gentillesse, l'empathie ? — Parce que, du coup, ça imite très bien, mais ça n'est pas. C'est pas humain, en vérité. Ça reste des machines. D'ailleurs, ce qui est très très fascinant, c'est que ça parle. En 3 secondes, je peux parler avec Chajipiti, je peux lui demander, je peux lui dire « Ma fille a été quittée par son chéri. Elle est malheureuse. Qu'est-ce qu'il faut que je lui dise ? » Il va répondre comme un psychologue.

Speaker 1: Mais pas des trucs idiots, intelligents. — Mais est-ce qu'ils peuvent s'affranchir ? — L'intelligence artificielle ? — Non, du code.

Speaker 5: — Du code humain et de l'homme, et trouver son indépendance. — Dans la grande littérature de science-fiction, on voit les machines, précisément, développer une conscience. — Voilà. Mais c'est la SF. — Et ça, ça n'existe pas. Enfin pour vous, en fait, il n'y a pas un risque.

Speaker 4: — Pour moi, c'est la seule... — C'est-à-dire qu'on peut toujours tenir la prise, quoi, et débrancher. — Absolument. Autrement dit, vous avez maintenant une... On va vers ce qu'on appelle « AGI » en anglais, l'intelligence artificielle généraliste. Donc elle sera supérieure à nous dans tous les domaines de l'intelligence. Par exemple, il a pulvérisé récemment les plus grands profs de maths aux universités américaines. Elle n'était pas très bonne en maths. Je vous donne un exemple. J'ai fait passer le QI, le Wechsler, le WISC. Quand j'étais gamin, j'ai fait une licence de psycho. Dans le certificat de psychoexpert, on se faisait passer entre étudiants le QI, parce que ça faisait partie des épreuves que la dame qui faisait le cours nous obligeait à faire. La moyenne dans le TD où j'étais, c'était 110, ce qui est bien, d'ailleurs. C'est très bien. J'ai fait passer moi-même le QI à Chajipiti. Moi-même, parce que je voulais toujours vérifier. Il a 160 de QI. Et ce qui est très intéressant, c'est que je lui ai fait passer les épreuves de bon sens en langage naturel. Parce que 1, 3, 5, 7, 9, 11, même si tu as un QI de bulot, tu sais ce qui vient après. Tandis que là, je lui ai fait passer... Alors je vous l'ai fait passer, mais faites attention dans les dîners en ville. Il ne faut pas faire ça, parce que quelquefois, il y a un ami qui se trompe. C'est gênant. Voilà. On dit à la personne... Je vais vous dire une phrase bête. Il y a une bêtise dedans. Où est la bêtise ? Et la phrase... Le boulanger perd sur chaque petit pain, mais il se rattrape sur la quantité. Qu'est-ce qu'il y a de bête là-dedans ? 4 secondes. 4 secondes. 4, pas 6. 4. Si le boulanger perd sur chaque petit pain, plus il en vend, plus il perdra et il va faire faillite. Même celui qui trouve... Et vous. Mais on va mettre une minute, peut-être, pour formuler la chose. — Le temps de résonner, de formuler. — Le temps de résonner, trouver les mots. Voilà. 4 secondes. Juste un exemple encore. J'ai donné 50 pages de mon livre à traduire pour un ami d'Anicon Bendit qui parle pas le français. Donc j'ai fait traduire en allemand. Moi, j'ai été traducteur professionnel pendant 30 ans. J'ai traduit « La critique de la raison pratique » de Kant dans la Pléiade. Bon. Peu importe. Mais du coup, je peux vérifier. Il a mis 6 minutes pour traduire 50 pages. — Et c'était cohérent. — C'est pas cohérent. C'est parfait. C'est mieux que ce que j'aurais fait. J'ai pas une virgule à changer. Même les blagues, même les mots difficiles. — C'est impressionnant. Mais alors Luc Ferry... — Le métier de traducteur est mort.

Speaker 2: — Est-ce qu'on peut utiliser l'intelligence artificielle en politique, par exemple, pour trouver un budget ? Est-ce que ça pourrait aider François Bayrou

Speaker 4: à trouver un budget qui convienne à tout le monde ? — Très très intéressant comme question parce que là, on retrouve l'humain. Parce que ce qu'il faut aujourd'hui, par exemple, pour avoir un bon budget de la France, c'est pas du tout de l'intelligence, c'est du courage. Ça n'a rien à voir. Et ça, c'est humain, pour le coup, parce qu'on sait très bien ce qu'il faut faire. Il faut réduire massivement le nombre de fonctionnaires en renouvelant pas des départs à la retraite, parce que là, on peut plus. Et il faut travailler plus. Voilà. En gros, c'est ça. Mais il faut pas taxer davantage. Taxer davantage est une catastrophe. — Donc il faut baisser les impôts... — Bien sûr. Baisser les impôts. Voilà. — ...et baisser le nombre de fonctionnaires. Et c'est ce qu'on va pas faire. — Moi, je suis fonctionnaire. Et j'aime la fonction publique. Mais on arrive à... C'est possible.

Speaker 1: — Est-ce qu'on pourrait pas un jour demander justement à François Bayrou, à Tchad Jipiti, en disant « Voilà, quelle est l'équation budgétaire ? Quelles sont les meilleures solutions ? Qu'est-ce qu'il convient de faire pour... » — Ah bah Nenad va le faire.

Speaker 4: — J'ai fait ça l'autre jour avec... — Non mais on peut imaginer que ce soit Tchad Jipiti qui élabore les programmes publics. — Sauf qu'après, il faut avoir le droit de l'appliquer. — J'étais avec un ancien ministre des Affaires étrangères. On dînait ensemble. Il me dit « Mais de toute façon, qu'est-ce qu'il peut faire ? », etc. Je lui dis « Est-ce que tu veux voir ? ». Je demande « Qu'est-ce qu'il faut faire pour trouver une solution à Gaza ? Qu'est-ce qu'il faut faire pour trouver une solution à l'Ukraine ? ». Il me développe 6 points qui sont tout à fait intelligents et qui sont tout à fait... — Sauf qu'après, il faut l'appliquer...

Speaker 2: Par exemple, vous, vous êtes plutôt pour la méthode tronçonneuse, c'est-à-dire on réduit les dépenses.

Speaker 4: — Tout le monde le sait aujourd'hui. Tout le monde le sait. Voilà. — Parce que là, on y va plutôt à la lime à ongles, là. — Oui, c'est ça. Mais ce qu'il peut pas faire... Je vais pas être grossier, mais bon, la grève de couille, ça prend pas toujours, quoi, pour dire les choses un peu prudemment. — Oui, mais vous savez très bien que François Bayrou...

Speaker 2: — Ça, il peut pas faire. — Oui, mais il n'y a pas de majorité dans ce pays, maintenant. On a 3 blocs. — Désolé d'être un peu gros. — Non, mais c'est bon. On comprend. — Lucre, vous savez très bien. Vous avez été aux affaires en quelque sorte, ministre. Donc vous avez vu bien comment ça se passait. C'est-à-dire même avec une majorité, c'est compliqué de...

Speaker 4: — Mais sans majorité, c'est pas possible. C'est pour ça que si on veut parler 3 secondes de politique, je ne peux pas jeter la pierre à Bayrou. Pourquoi ? Parce que si on considère que l'essentiel, c'est la stabilité politique, mieux vaut avoir un mauvais budget et stabilité politique que d'avoir un très bon budget et puis de sauter à nouveau avec la censure. Donc on peut discuter de ça. Je comprends. Mais ce que Tchadjipiti peut pas faire, c'est donner le courage aux hommes politiques. Ça, il peut pas le faire.

Speaker 5: — Mais alors, n'est-là la trousse ? — J'étais... Alors, il propose un plan en 4 points. Je vais vous dire que le premier, parce que c'est un peu long. C'est ça qui est intéressant. Le premier, c'est réduire les dépenses publiques, réforme des dépenses sociales, rationalisation de la fonction publique, réforme des retraites pour allonger progressivement l'âge légal de départ à la retraite, révision des niches fiscales, augmenter les recettes fiscales en luttant contre la fraude avec une fiscalité écologique qui augmente les taxes sur les activités polluantes, imposer davantage les géants du numérique qui réalisent des bénéfices importants en France mais ils payent peu d'impôts, et augmenter la fiscalité sur les successions et les patrimoines élevés.

Speaker 2: — C'est intéressant, parce qu'il y a à la fois des mesures plutôt de droite mais aussi des mesures de gauche, notamment sur les successions.

Speaker 4: C'est dur en même temps. Ça, c'est Macronisme, finalement, Tchadjipiti. — Non, parce que globalement, les 5 premières mesures sont les bonnes. Voilà. Mais simplement, ce qui est très intéressant, c'est qu'il faut pas oublier les prompts. Les prompts, c'est les questions supplémentaires. Je lui ai fait faire une discerne de philo, par exemple. Je lui ai dit... Voilà. J'ai fait exprès de prendre un sujet borderline, sleazy, on dirait en anglais, pas politiquement correct. Voilà. Il y a une guerre atomique. Il reste plus qu'un homme et une femme sur la Terre. L'homme veut perpétuer l'humanité. Donc il veut coucher avec la dame. La dame veut pas coucher avec lui parce qu'elle le trouve trop moche. Est-ce qu'il a le droit de la violer ? Il me répond en 3 points, en 8 secondes. 8 secondes. Mais après, il y a les prompts. Premier point, il a pas le droit de violer. Quel que soit l'enjeu, c'est interdit par toutes les déclarations des droits humains. Il parle des droits humains. Il est californien. Bon. Deuxièmement, si ça marche pas, il peut quand même essayer d'utiliser l'argumentation, l'éthique de l'argumentation. Ça renvoie à Jürgen Habermas, la discoursse éthique, l'éthique de l'argumentation, pour essayer de convaincre la dame. Mais si ça marche toujours pas, il peut essayer de trouver un hôpital désaffecté pour trouver de quoi faire une PMA, une procréation médicalement assistée. Mais c'est pas con. Et après, les prompts, je lui demande « Mais pourquoi les déclarations des droits de l'homme interdisent le viol ? » Il répond « Quelle déclaration des droits de l'homme ? » 76, 89, etc. Je lui dis « Et qu'est-ce que c'est que l'éthique de la discussion de Jürgen Habermas ? Il met 10 pages sur Habermas et Apple. Et qu'est-ce que c'est qu'une PMA ? » Au bout d'une demi-heure, mes amis, j'ai 150 pages avec les prompts. Si je suis pas un étudiant débile, je réécris un peu les choses, j'arrange ma sauce et j'ai un bon mémoire de maîtrise et fait en 40 minutes.

Speaker 2: — Mais alors donc, ça va nous rendre paresseux. — Mais bien sûr. — On va plus réfléchir. On va plus aller chercher l'info.

Speaker 4: — Très bonne question, mon ami. C'est pour ça que je dis paradoxalement, moi, à la fois vieux prof et ancien ministre de l'Éducation, au lieu de l'interdire, il faut le rendre obligatoire. Je donne à mes étudiants une disserte de philo. Je leur dis « Est-ce qu'il y a des critères du beau ? ». Vous demandez à Tchadjipiti la réponse. Et puis après, vous commencez à travailler, à discuter.

Speaker 5: — Mais ça, on est prêts à ça. Honnêtement, aujourd'hui, dans l'éducation nationale, quand on voit tous les chantiers qu'il y a à entreprendre, est-ce qu'on est prêts aujourd'hui à une grande formation pour tous les professeurs, pour qu'ils apprennent à inclure...

Speaker 4: — C'est l'urgence absolue. Si j'étais ministre de l'Éducation encore aujourd'hui – je le dis à Mme Bande si jamais elle nous écoute, mais je pense que de toute façon, elle s'en ficherait comme de l'an 40 –, la première chose que je fais, c'est, un, je réforme de A jusqu'à Z les programmes d'instruction civique pour que les mômes comprennent ce que c'est que les réseaux sociaux, parce que ces machines-là, je pourrais vous le montrer, j'en ai plein. Ça fait des deepfakes, c'est-à-dire des vidéos truquées. J'ai là des vidéos truquées. J'ai des copains qui fabriquent ça qui sont dingues, de chez dingues. J'ai une vidéo de Macron disant qu'il a lu mon livre et que c'est génial et qu'il le recommande à tout le monde. C'est impossible de voir que c'est faux. Bah si, sauf si on connaît les relations qu'on a, mais c'est... — Oui, mais alors pardon, vous parlez... — Vous pouvez mettre... Je termine juste... Pardon, excuse-moi. C'est juste pour... Mais je peux mettre la tête d'une gamine de 3e sur un film X, un film porno, le balancer sur les réseaux sociaux et foutre sa vie en l'air.

Speaker 2: — Donc là, il faut enseigner cela à l'éduc... — Mais bien sûr. — Dans les écoles. Mais Mme Borne, vous l'a citée, pour l'instant, sa priorité, ça semble être l'éducation sexuelle à l'école. C'est important, ça ? — Alors moi, à l'école primaire, je suis à fond contre.

Speaker 4: En revanche, au collège, bien sûr, pourquoi pas. Mais ça dépend de ce qu'on entend par éducation sexuelle. Mais à l'école primaire, quand je regarde le programme et qu'on apprend aux gamins de 7 ans... — Là, ça va commencer à partir du CM2, oui. — Voilà, CM2. Enfin mettons 9 ans de désigner leur partie génitale avec les bons mots, mais qu'ils continuent à dire le zizi, ça me gêne pas.

Speaker 1: — Oui, c'est pas essentiel. — Ils sont obligés de... — Ecoutez, Mme Borne, justement, la ministre de l'Éducation nationale, interrogée sur la question du genre, si vous avez vu ce qui s'est passé aux États-Unis. Voilà ce qu'a dit Mme la ministre de l'Éducation nationale,

Speaker 6: ex-première ministre. — La notion d'identité de genre, elle figure quelquefois dans le programme. Vous savez que c'est une notion qui figure dans le code pénal, qui réprime les discriminations en fonction de son sexe, de son identité de genre ou de son orientation sexuelle. C'est à partir du lycée qu'on évoque cette notion d'identité de genre. Voilà, ça fait partie du code pénal. Donc je pense que c'est important aussi d'expliquer aux lycéens. Mais vraiment, je vous dis, ce programme, il porte sur la vie affective et relationnelle dans le premier degré. Et on aborde les questions d'éducation à la sexualité dans le second degré.

Speaker 2: — L'identité de genre, c'est important ? Trump, il a réglé la question. Il a dit « Y a deux genres, ça suffit ».

Speaker 4: — Ça m'a fait rire. Moi, je viens d'acheter un portable, enfin un ordinateur. Et la première chose qu'on demande, c'est « Est-ce que vous voulez qu'on vous parle au masculin, au féminin ou au non binaire, au neutre ? ». Et donc oui, ça devient un peu ridicule. Alors maintenant, si on veut dire par là qu'on peut avoir une orientation sexuelle qui n'est pas la même que sa biologie de départ, c'est une évidence. On peut être homosexuel. Si c'est ça que ça veut dire et que c'est respectable, il faut l'apprendre aux enfants. Bien sûr que oui.

Speaker 2: Mais ça, ça fait partie de l'instruction civique. — Non, mais ça veut dire qu'on peut être dans un corps d'homme et se sentir femme et vice-versa.

Speaker 4: — Pourquoi pas ? Mais le problème, c'est plutôt d'enseigner aux enfants le respect des autres. Ça fait partie des programmes d'instruction civique. Et je pense... Voyez, je vous explique ça. Pour l'éducation, on va rentrer dans un monde avec les deepfakes et les jumeaux numériques. J'ai un copain qui a fabriqué un jumeau numérique de lui-même, qui a discuté pendant 20 minutes avec ses enfants. Ils ont pas su que c'était pas leur père. — Ah oui ? — Voilà. Le patron de Zoom se fait remplacer régulièrement par des jumeaux numériques dans les grandes assemblées générales. Et il répond très bien aux questions. Voilà. Donc dans les visions conférences, vous pouvez pas être certain que vous parlez avec la personne qui porte le nom qu'elle est censée avoir.

Speaker 1: — Mais quelle est la solution pour... Est-ce qu'il faut... — Les interdire. — Non, mais au-delà de ça, on revient au point de départ de notre discussion. Il faut une force européenne de l'intelligence artificielle. Il faut que l'argent public qu'on n'a pas en ce moment, il faut le débloquer quand même pour dire on y va, ou il faut aider le privé. Enfin quelle est la réponse sur l'intelligence artificielle ?

Speaker 4: — Parce qu'on a... Je crois qu'on met 4 milliards sur la table. — Deux choses. D'accord. D'abord, on va rentrer dans un monde qui sera trunkiste jusqu'au bout des ongles. C'est-à-dire qu'on ne saura absolument plus ce qui est vrai, ce qui est faux. Les deepfake, j'en reçois tous les jours. Voilà. Et vous aussi, vous voyez Zemmour qui danse, je sais pas quoi, la Rossmar, parce qu'on voit que c'est évidemment du faux. Mais vous pouvez très bien fabriquer une deepfake intelligente et faire croire par exemple que quelqu'un insulte tous les musulmans de la planète et il a une fatwa et sa vie est foutue, ou ce que je disais pour la gamine de 3e. Donc on va rentrer dans un monde où du coup, pour l'éducation nationale, il faut absolument un cours d'esprit critique. Voilà. Il faut développer la science. Et pour l'UE, la question que vous posez, moi, je soutiens à fond le rapport Draghi. Il faut qu'on investisse massivement autant que les États-Unis, c'est-à-dire en gros 200 milliards d'euros dans les 3 années qui viennent sur la 3e révolution industrielle.

Speaker 2: — Il y a un sommet. — Sinon, on est une colonie des États-Unis. — Il y a un sommet sur l'intelligence artificielle organisé par Emmanuel Macron

Speaker 4: au début février. — Il est consternant. — Pourquoi il est consternant ? — Il est débile. Il est consternant parce que j'ai regardé de près. Il est entièrement orienté sur la régulation. — Ah bah ça, c'est l'Europe. On régule, nous. — Évidemment. On régule. Alors on va interdire... Il y a acte interdit les caméras de surveillance. Je n'ai rien contre les caméras de surveillance. Je m'en fous comme de l'an 40. Et c'est très bien d'avoir des caméras de surveillance à Nice. Ça permet de retrouver un gâteux qui est sorti de son EHPAD et qui ne retrouve pas son chemin ou de retrouver un enfant qui s'est perdu ou qui a été enlevé. Et donc si vous n'avez rien... Voilà. — Donc on n'est que sur la régulation. À l'époque créée, on régule. — On régule. On régule des choses qu'on n'a pas inventées.

Speaker 5: — Vous vous évoquez à l'instant des fake news qui, notamment, traitent de la politique. Et pour tout vous dire, moi, comme chef du service politique, c'est mon principal défi. C'est comment on traite une campagne présidentielle en réussissant à distinguer le vrai du faux. — C'est très difficile. — Est-ce que pour vous, les politiques sont prêts à une campagne précisément noyée par l'intelligence artificielle, le deepfake, les fake news ? Est-ce que pour vous... Quel conseil vous donneriez, par exemple, au candidat à la présidentielle de 2027,

Speaker 4: de ceux qui se lancent ? — Alors d'abord, si j'étais encore dans un gouvernement, je convaincrais le ministre de la Justice et le ministre de l'Intérieur non pas d'interdire les deepfakes, donc ces fausses vidéos, mais d'indiquer comme on faisait quand j'étais petit à la télévision, où on marquait « interdit au moins de 10 ans ou de 12 ans », de marquer que c'est fait par l'IA. C'est obligatoire. Et donc je rendrais ça obligatoire, mais sous peine de prison, si on trahit la loi, si on transgresse la loi. Donc déjà, ce serait la première chose à faire. Et puis encore une fois, il faut qu'on enseigne à tous nos concitoyens qu'on va rentrer dans un monde où on ne saura plus jamais ce qui est vrai ou ce qui est faux. Donc esprit critique. On a une chute de la maîtrise des sciences. Moi, je suis allé voir Rachida Dati pour lui dire... Elle s'en demande. J'avais fait un papier là-dessus. Elle m'a demandé de venir la voir. La culture scientifique devrait faire partie du ministère de la Culture. Ils s'occupent que des starlettes et de l'avant-garde. Mais la culture scientifique, c'est intéressant. Et en plus, la vulgarisation scientifique, on a des très grands scientifiques qui sont capables de vulgariser. Ça passionne. Voilà. Et donc ça, c'est très important dans l'esprit critique, parce que, si vous voulez, il n'y a rien à faire. La Terre n'est pas plate. Elle est ronde. Donc en philo, on peut toujours discuter. En politique, on peut toujours discuter. Mais là, il n'y a pas de doute.

Speaker 1: — Merci, Luc Ferry. Il y a grand remplacement ou complémentarité aux éditions de l'Observatoire. C'est passionnant. — Vous êtes gentil comme tout. — C'est le défi qui attend notre civilisation.

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